là, au moment ou j'écris...
La nuit s'est glissée partout.
le bruit de la fontaine sous ma fenêtre, continue à me tenir compagnie , avec la lueur bleue de l'ordinateur....
Mon arbre rouge est planté.
je vais sans doute mettre un pull léger, faire un dernier tour du jardin....et boire un dernier thé sur les marches de la maison.
Je mords dans ma solitude comme dans un fruit et toute la douceur et les parfums sucrés de la terre coulent dans ma gorge.
J'ai reçu une très belle lettre venant d'Italie, qui parle du temps...
Le temps vu comme une sorte d'Océan dans laquel nous nagerions libres...libres d'aller vers le fond , nos souvenirs les plus anciens, de traverser les des courants moins profonds, de remonter à la surface de l'instant présent.
J'aime cette images de vies fluides , qui continuent d'exister avec nous ou sans nous, selon nos désirs d'immersion plus ou moins profonde.
Rien ne serait vraiment perdu, vraiment abandonné.
Encore une fois il faut poser un acte de foi...c'est cette vision là que je choisis pour moi...parce que c'est celle qui me rend la vie acceptable
Il doit y avoir des tristesses que l'on porte en soi depuis toujours.
Très loin, hors d'atteinte.
Des tristesses orphelines, sans cause et sans consolation.
J'ai passé quelques jours à sculpter du temps.
Le temps est une matière somptueuse, changeante, dense, élastisque, sensuelle et une matière pleine de surprise. Quand on pétrit du temps, on y trouve des bulles de silence, des mots doux et lisses comme de minucules galets, des mots plein d'éclats , des mots tranchants , qui cisaillent la peau.
Il faut faire attention avec le temps, il faut réfléchir avant de savoir sous quel angle le sculpter, c'est une matière précieuse à ne pas gâcher.
Penser après le travail à ramasser toutes les infimes particules de temps que vous auriez pu laisser perdre, elles peuvent encore contenir du sens.......
Travailler sur les mutiples en soi.
La complexité de toutes ces facettes. Je ne suis pas changeante mais multiple, comment dire ? trop nombreuse en moi.
Je ne sais pas dire cela, alors je le peins....
Je le sais rien n'y fait. Que l'on regarde de loin ou de plus près, le regard est toujours réfractaire à l'aveu.
C'est quelque chose qui nous échappe toujours .
Et pourtant on l'a déjà vu ce regard là.
C' était un soir, vous lui parliez et il ou elle vous regardait avec ces yeux-là. Ce regard très précis. Vous vous souvenez même que vous vous étiez dit que ce regard était implacable dans son apparente douceur.
Un regard ou rien ne ment et rien ne protège.......
Le dos des femmes est un énigme.
"C'est dans l'incertitude que la sensualité progresse, en silence, en secret. Nuque offerte, ou préservée ? et le regard.
Le dos des femmes est du même ordre que le silence, l'aveu de faiblesse, l'infime abandon.
Ou la volte-face...
Se sentir femme, seule et pour soi.
Depuis toujours le dos des femmes est une énigme
Aujourd'hui l'Atelier était désert.
Jérémie en livraison, Serge en vacances , Marie-Hélène en pré-vacances de Nöel chez sa fille.
L'atelier-navire avançait tout seul, poussé par un vent calme.
J'ai mis un point final à tout ce qui devait être terminé.
J'ai fait un grand nettoyage de l'atelier.
J'ai bu un dernier thé, bien chaud et j'ai fermé la porte de l'atelier à clé. Je suis partie sans me retourner...
Je suis rentrée chez moi....
Il parait qu'hier c'était le solstice d'hiver, le jour le plus court de l'année...la lumière va revenir tout doucement
Journée pleine de stress à courir pour finir.....
Quoi? me direz vous...les dernières sanguines pour l'expo. dessiner, coller sur les chassis faire les finitions..... et recommencer.
Il en faut pour aller jusqu'a fin janvier...ma fatigue est élastique.... Je sais.. je sais... repos, ne pas aller au-delà de ses forces , écouter son corps....etc etc.
Rien à rétorquer c'est la voix de la raison.
Mais il se trouve que je déteste la raison, l'équilibre, le juste milieu.
Pardon ...mais je déteste... Je veux le trop, la passion, le fil du rasoir, le bord du gouffre...
Je veux savoir où est la limite , où est ma limite. Comme les enfants qui veulent casser leur jouet, pour voir ce qu'il y a dedans...
Qu'est ce qu'il y a en moi, comment ça marche moi? qu'est ce que c'est moi? et si personne n'a de réponse alors..... qu'on me laisse brûler en paix.....
"Je ne saurai vous dire la jouissance que me donne votre corps....les mains sur la peau touchent l'âme à vif. Mais rien, non, rien n'égale en volupté la contemplation de votre visage: un fin mélange de plaisir et de détresse recouvre ses traits, comme si - pendant quelques instants- vous n'étiez plus personne. Comme si vous ne possédiez plus rien, ayant par avance tout perdu. En vous regardant, j'apprends ce que c'est qu'un visage, et qu'il s'ouvre dans la grâce d'une offrande."
C BOBIN in" LETTRES D'OR. "
Les commentaires récents