26 octobre.
C'était la date de son anniversaire.
L'infirmière m'a rendu les vêtements de ma mère, et les menus objets de sa mémoire.
Son alliance usée, la montre pendentif qu'elle avait autour du cou. Ses bracelets, ses lunettes. sa robe enfin, encore imprègnée de l'odeur de sa peau.
L'hôpital m'a rendu le parfum de ma mère, mon enfance et tout l'amour du monde dans un sac poubelle bleu.
j'ai toujours eu des cailloux dans mes poches.
Où caché des secrets sous les cailloux.Quand j'étais petite.
J'en ai partout dans la maison...ramassés ça et là.
Ils sont toujours posés quelque part, comme une offrande, aucune idée du pourquoi de la chose. C'est une sorte de résidu de quelque ancien rite païen.
Il y a aussi ce sentiment d'adéquation, entre le caillou, l'objet auprès duquel il est posé, et moi.
Je ne peux pas expliquer.
Mais je ressens ça très fort .
Les insomnies ne connaissent pas la logiquede la fatigue.
Réveillé à 1heure du matin, puis à deux et levée à trois, depuis je pense à de nouvelles sculptures , je bois du thé...je vous écris du fond de ma nuit blanche .
L'insomnie est la "folle au logis" , une lanceuse de couteaux, et chaque couteau lancé coupe un des fils de votre nuit, elle danse et lance au hasard...
Et la nuit est traversée des éclairs bleus de la lame, et chacun vous refait vivre une aube pâle et la solitude qui va avec.
Le lendemain votre visage reflète la pâleur de toutes ces aubes , et votre corps porte en lui l'empreinte de ces multiples nuits.....
Pourquoi avons-nous perdu ce talent là ?
Pourquoi quelque visage que nous peignons, sommes-nous devenus aveugles à l'essentiel ?
Comment sommes-nous devenus si habiles à faire, à dire, et si distants de la vérité ?
Pourquoi avons nous grandi si vite?
Entre les deux visages que je vous ai montré hier, il y a celui-là...quand on sait qu'on l'a trouvé et qu'il est à deux doigts d'apparaître dans sa nudité.
Je suis fascinée par les visages.
Les vrais, et les autres...
Il arrive de temps à autre, en général très très tard le soir, qu'un masque tombe au hasard, et il y a quelque chose de si poignant dans l'émergeance d'un visage nu... Une telle fragilité , un tel dénuement... que l'âme semble affleurer sous la peau...
Il faut attendre longtemps quelquefois....mais si quelqu'un un jour vous offre ce visage là, c'est qu'il ou elle vous a tout donné.....
Depuis deux jours c'est de l'atelier que je vous écris..chez moi c'est toujours silence internet.
Mais je suis toujours dans un jardin, et ma place entre un arbre et l'eau, la-bas c'est celle de la fontaine ici c'est la rivière.De l'autre coté de l'atelier, un grand jardin qui dévale vers l'eau.
La seule chose qui change c'est que la-bas je vous écrivais toujours ou presque la nuit. et ça c'est très différent.
Les mots de la nuit ne sont pas les mêmes, ils ont cette lumière très douce, très patinée des mots du soir, ils ont ce velours qui manque aux mots du jour...
J'ai retrouvé cette image du "Pélerin", pour illustrer une phrase de Sven qui m'a touchée:
"Merci du soin que vous prenez de nous".
Qui m'a fait prendre conscience de l'importance que vous aviez prise dans ma vie. Flo et moi avons eu plein d'idées pour faire de ce blog un lieu encore plus riche, plus rempli d'imaginaire...on verra quand nous serons au point.
Mais si cette phrase est vraie, le pendant, l'autre versant, non dit, l'est aussi et je pourrais tout autant dire merci du soin que vous prenez de moi.. je pourrai vous dire que depuis que vous êtes là, je marche moins seule..
Vous avez cette manière tendre délicate de de dire les chose, nous ressentons de la même façon les minuscules choses poétiques de la vie, un rideau qui vole, des chaussures de petite fille où des fleurs éclosent,des sculptures qui parlent...
Je nous sens de cette "foule sentimentale", pélerins des mêmes rêves, rêveurs volontaires et entêtés... avec nos ailes trop grandes...
J'avais promis la photo d'e l'Icare qui est dans mon jardin.
En ce moment la végétation, lui mange un peu son espage vital et lui enlève de son ampleur...
C'est une sculpture de Charbonnel. C'est surtout un coup de foudre pour une sculpture magnifique et le sujet.
"Icare, fils de Dédale et de Naucraté, Icare est enfermé avec son père dans le labyrinthe construit pour le roi de Crète Minos. Afin de s’échapper, l’inventeur Dédale fabrique des ailes de plumes, fixées par de la cire, mais, au cours de son vol, Icare s’approche trop du soleil qui fait fondre la cire des ailes : il chute et se noie dans la mer."
Encyclopédie Microsoft® Encarta® 2003.
Ca c'est l'histoire, moi j'aime le symbole. Aller plus haut , plus près de la lumière, ne pas s'occuper de la raison, de sa prudence. tout risquer au risque de tout perdre ou tout gagner...
L'enfant liane:" tu es triste?"
Marie:"..........."
E-L:"on va se séparer pour toujours, c'est ça?"
M:"..................."
E-L:" moi, je vais vivre, je suis enfin sortie de la terre, je vais voir à travers tes yeux, je vais sentir la caresse du regard des autres, être touchée, être aimée...et toi?"
M:" Je vais rester là,.... il y a une ligne droite qui relie le jardin bleu et l'atelier et une autre entre mon âme et ma vie. C'est là, au croisement, à ce point géométrique précis que vous apparaissez....."
E-L:" Alors ta vie ce n'est que ça?......"
M:"..................Il va falloir que tu partes"
E-l:" pourquoi tu ne réponds presque jamais aux questions?"
M:"............ "
E-L" et pourquoi tu fais ce travail?"
M:" Pour répondre aux questions!"
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