Quelquefois je voudrais tenir la nuit toute entière, froissée dans la paume de ma main,la tenir bien serrée et ne la lâcher qu'au petit matin.
Quelquefois je voudrais que des silhouettes livides, arrêtent de parcourir ma nuit dans tous les sens.
Quelquefois je voudrais pouvoir écrire sur tous les tous les murs de ma chambre, et sur le plafond et le sol aussi , et puis fermer la porte et m'endormir enfin.
Moi j'aime la fragile architecture des armatures.
Mon architecture intérieure doit ressembler, j'imagine, à cette photo. Bancale, un peu aléatoire,avec des lignes de force , des ombres portées , des équilibres très improbables, quelques lignes brisées et d'autres qui ne mènent à rien...Mais quand même ...vu de loin....de très loin , ça fait illusion.
On croirait même qu'il y a des cohérences.
Je suis allée à l'atelier regarder , la nouvelle armature...
J'ai imaginé à la base trois grands galets plats en déséquilibre sur lequel serait posée une toute jeune fille, menue, debout... une adolescente....peut être que l'histoire commencera comme ça...
Elle a ...disons 17 ans , toute en fragilité et en lumière, elle a bien vu que ces trois galets étaient en déséquilibre, mais elle est comme ça. Tout ce qui est en déséquilibre l'attire, la seconde avant le point de rupture des choses, le pas avant le vide.......mais elle.....
Tous les insomniaques me comprendront. la nuit, toutes nos vies rêvées se démultiplient.une conversation téléphonique de la journée la journée, devient ,si elle se passe à une heure ou deux heures du matin, une confidence, un secret partagé, ou un jeu c'est selon....
Le jardin bleu,si familier se met à user de tous ses sortilèges, les arbres grandissent, deviennent plus sombres, que le vent se lève et c'est un océan qui vous entoure.
Le temps devient fluide, passé présent ...cette petite fille qui passe dans la nuit pourrait être kiya ou la petite Marie.Juste une ombre qui passe.
La nuit blanche est une immense page vierge où écrire la vie rêvée qu'on s'est choisi.
Il y a quelque chose de très doux de très lumineux qui flotte dans l'air du temps....
Quelque chose de l'ensommeillement, de la fluidité et de la grâce.
Il y a des guerres qui sont en voie d'extinction en moi. Des territoites entiers en état de paix.
Un silence inespéré.
Depuis l’enfan Paradoxalement nos maîtres, commençaient d’abord par nous enseigner les mots. Tous. Nous devions les écrire, en trempant le doigt dans du miel, ainsi en les léchant, du bout de la langue nous nous nourrissions de leur sens.. puis nous les observions longuement. calligraphie, sonorité, poids, couleur, nuance … Nous nous exercions à leur maniement, les plus effilés et tranchants filaient comme des lames. Les autres, les mots qui soignent guérissaient toutes les blessures, celles de l'âme, celles de corps. Puis, au cours des années, nous apprenions à supprimer les moins utiles,ou les moins beaux… Certains d’entre nous arrivaient à l’adolescence avec seulement une dizaine de mots, leurs préférés,les plus tendres, les plus fort ou les plus audacieux. Ils les gardaient aussi longtemps qu’ils en ressentaient la nécessité. Après….. tout n’était qu’une question de temps…… lorsque nous étions prêts a abandonner mot après mot jusqu'au dernier, sans regret, sans peine, c’était que notre enseignement arrivait à son terme. Il était temps, pour nous, de partir sur les routes, pour témoigner du Silence. 
ce, j’étais ici pour apprendre l’art subtil du silence.
Hier , je suis allée chez mon ophtalmo....deuxième fois que je le vois dans ma vie, presque deux ans entre la première et la dernière visite.
Il me fait tout les examens, comme d'habitude je ne dis pas un mot..au moment où je lui réglai ses honoraires il me regarde attentivement et me dit:"ah oui! vous êtes celle qui n'aimez pas vivre avec les gens!"
Je l'ai regardé et je lui ait souri...
C'était pas tout à fait ça, mais je me suis dit que c'était pas grave d'être pour lui... juste un regard et "celle qui n'aime pas vivre avec les gens..."
Aujourd'hui c'est dimanche de belle solitude. La belle solitude..... celle qui vous vient comme une eau fraîche.
La belle solitude du jardin , qui pendant ces trois jours s'est adouci de couleurs tendres.
La belle solitude des mots qui bercent .
La belle solitude du silence ponctué des bruits ..espérés, la cloche du village, l'envol brusque des tourterelles, le chuchotement de la fontaine sous ma fenêtre...
Plus d'urgenc
e à être ici où là, plus rien ....sauf la paix du jardin, un bain parfumé, boire un thé, aller voir de plus près la beauté des fleurs fraîches écloses, s'endormir doucement avec un livre qui vous glisse entre les doigts.....
Se laisser dériver juqu'a la fin de l'après midi, avec une lenteur infinie....
L'inachevé, les points de suspension, les phrases que l'on ne finit pas, les lettres qu'on aurait du écrire, les réponses qu'on ne fait pas, les coups de téléphone qui résonnent dans le vide....
Tout cela se perd où?
Peut-être qu'il y a un endroit, où tout cela est tombé en strates successives depuis notre enfance.
C'est peut être là qu'on se perd de temps en temps..... au départ, on buterait bêtement sur un mot et on tomberait dans cette épaisseur vertigineuse de silences.....
Depuis plusieurs jours le ciel était uniformément gris, et mon âme , par lassitude ,sans doute, avait cessé de lutter contre l'envahissement des gris. Alors hier j'ai ouvert mon livre et je suis partie.
Je suis entrée dans cette lumière si particulière, un gris certes, mais comme patiné d'or pâle. (Le changement brutal des couleurs pourrait être est dangereux pour les âmes fatiguées).
Pénétrer dans cette eau tiède était comme s'immerger dans la quiètude même, je suis restée longtemps , front contre front, l'esprit en paix.
Ce matin je reviens.
ici, rien n'a changé, la pluie tombe inéxorablement sur le jardin alourdi, soûlé d'eau, mon âme n'a pas voulu me suivre elle est resté la -bas , alors j'ai ramené mon corps comme je ne sortirai probablement pas de chez moi, on pensera que je suis là....
C'est encore une des merveilleuses photos que Claire avait faite à l'atelier.
Pardon à tous ceux qui se sont inquiétès de mon silence, c'est un peu une maladie chronique chez moi.
Mes proches me le reprochent souvent et tout aussi souvent je ne m'étais pas vraiment aperçue que je parlais de moins en moins, ou presque plus... Il en va de même avec l'écriture, la correspondance sans que mon affection ne soit en rien affectée.
C'est comme se noyer en soi tout doucement...
Les commentaires récents